Face à l’étendue du harcèlement scolaire, de plus en plus d’acteurs s’engagent pour aider les parents et les enfants à tenir bon. Dans ce contexte, Emmanuelle Piquet a fondé l’association Chagrin scolaire pour lutter contre les souffrances en milieu scolaire. Aidodarons lui donne la parole pour en savoir plus son engagement.
J’aimais résoudre des problèmes relationnels et accompagner individuellement les personnes. La thérapie m’a permis de me consacrer entièrement à ces deux aspects, sans les contraintes du métier de DRH.
En recevant de nombreux enfants et adolescents, j’ai constaté que beaucoup souffraient dans la cour de récréation sans faire le lien avec leurs symptômes (énurésie, attaques de panique, colères…). Ce problème global relève d’un enjeu de santé publique. J’ai voulu agir pour aider ces enfants en détresse.
Le harcèlement est une escalade où un enfant se retrouve en position de soumission face à un ou plusieurs harceleurs. L’objectif est de rééquilibrer cette relation en travaillant avec l’enfant harcelé, car les harceleurs n’ont aucun intérêt à changer. Plutôt que d’essayer de moraliser ces derniers, nous aidons la victime à reprendre du pouvoir.
Nous misons sur trois compétences : le courage de l’enfant harcelé, son sens de l’observation et l’auto-dérision. En lui apprenant à feindre l’indifférence et à tourner les attaques en ridicule, nous déstabilisons les harceleurs. Dans certains cas, il faut aller plus loin et exposer leur comportement de manière inconfortable pour eux. L’intervention rapide est essentielle pour enrayer l’escalade de violence.
Beaucoup d’enseignants sont démunis face au harcèlement. Nous leur fournissons des outils concrets pour accompagner les élèves et avons mis en place un programme, "À l’attaque du harcèlement", qui forme des référents dans chaque établissement. Une enquête de 2022 a montré que 64 % des collégiens pensent que les adultes ne savent pas gérer ces situations. Un constat glaçant. Nous devons changer notre approche pour mieux aider les enfants.
Les chiffres stagnent et 40 % des cas que nous traitons concernent l’invisibilisation et l’exclusion, aussi douloureuses qu’un harcèlement visible. Les enfants harceleurs ont adapté leurs stratégies pour éviter les sanctions, mais n’ont pas renoncé à la toute-puissance que leur procure le harcèlement. Car ils y prennent un certain plaisir, immoral certes, mais qui est toutefois existant.
Observez les changements de comportement : anxiété marquée le dimanche soir, maux de ventre récurrents, enfant autrefois doux devenant agressif… Pour les enseignants, reconstituer le puzzle en observant et en interrogeant discrètement les élèves concernés peut être révélateur.
Écouter l’enfant, accueillir ses émotions sans précipiter d’actions. Lui demander ce qu’il attend permet de lui redonner du pouvoir. Il est essentiel que l’intervention ne renforce pas la dynamique du harcèlement.
3. Partager son propre ressenti avec l’enfant : exprimer son émotion, y compris en pleurant, peut l’aider à se sentir compris et soutenu.